Bon Appetit Jacques Mali
Bon appétit Jacques Maly
Jean Erich René
Ottawa le 28 avril 2009
J’apprécie la justesse de ton intervention et ton style courtois, deux
qualités rares sur nos forums. Mais je n’arrive pas à identifier les points
de désaccord mentionnés. Au contraire tu n’as apporté que plus de
précisions que je ne jugeais même pas nécessaires puisque les faits sautent
tellement aux yeux de tous. Pour mettre en évidence la corrélation entre la
privatisation et la déchéance de l’économie haïtienne consultons l’histoire
récente :
Jacques Maly,
1.- Je conviens avec toi qu’en évoquant la privatisation de la douane que
je voudrais parler du port et de l’aéroport de Port de Port-au-Prince qui à
mon avis représentent les deux plus gros morceaux des recettes douanières
d'Haïti. Combien de compatriotes ont expédié une voiture en Haïti et qui se
trouvent dans l’obligation de l’abandonner à la Douane parce qu’on réclame
des frais supérieurs au prix d’achat de ces voitures de seconde main. Je
peux encore te citer le cas d’un Groupe d’amis de la diaspora qui voulaient
porter secours aux sinistrés du cyclone Jeanne en 2004 en expédiant des
réchauds à gaz. 80.000 dollars ont été réclamés pour leur dédouanement.
Ils ont tout abandonné! Ce n’est qu’en 2007 qu’ils ont été livrés après le
ravage des cyclones aux Gonaïves. Ces deux exemples suffisent pour
illustrer les cas d’extorsion qu’exerce le Club de Bourdon au niveau du
port de Port-au-Prince. Savez pourquoi la route Cayes –Jérémie financée par
la BID depuis l’année dernière n’a jamais été exécutée? Ces mêmes
publicains ayant pris connaissance de ce projet ont récupéré le plan de
construction en déclarant que l’aire du tracé passe sur leurs propriétés
privées et réclament des dédommagements. Le coût de la route monte
automatiquement à 200 millions. La BID a laissé tomber Ce n’est que cette
semaine après le cri des Jérémiens : « Pas de route pas de vote » que le
Ministre des travaux Publics annonce que le projet commencera en juillet et
durera 30 mois. Prions le Seigneur!
2.-Le congé fiscal dont je parle ne s’inscrit pas du tout dans le cadre des
attributions de l’État pour couvrir les pertes enregistrés par suite du
déchouquage au départ d’Aristide en 2004. Les entreprises industrielles et
commerciales sont déjà couvertes par des polices d’assurance. L’allègement
fiscal est une incitation à l’investissement, mais le congé fiscal est une
gabegie administrative. Avec quoi l’État va-t-il s’acquitter de ses devoirs
: refaire les routes, ramasser les piles de fatras? C’est pas sérieux. Je
blâme Gérard Latortue à ce point de vue. Il a accordé ce congé fiscal parce
que ce sont les membres du Groupe des 184 qui l’ont choisi comme Premier
Ministre après avoir machiné la chute d’Aristide. C’était le prix payé en
retour pour son portefeuille de Premier ministre. Point barre.-
3.- Le dossier de la privatisation a été lancé depuis 1985. Mais aucun
gouvernement avant Préval ne voulait l’exécuter. Tout a commencé par un
document confidentiel de la Banque Mondiale daté du 11 avril 1996
recommandant une cure de minceur de l'État haïtien selon le régime de la
privatisation des entreprises publiques,condition sine qua non de la
reprise de l'aide internationale bloquée depuis 1995. La balle a été
encaissée à bout portant par René Préval qui, immédiatement après avoir été
reçu par Bill Clinton, a lancé les débats selon les voeux des Institutions
de Brettons Wood.
Le 2 Octobre 1996, An 193è de l'Indépendance, le Gouvernement de René
Préval, première version, a créé le Conseil de Modernisation des
Entreprises Publiques (CMEP). Dans un premier temps les entreprises visées
sont: la Minoterie d'Haïti, Le Ciment d'Haïti, les Télécommunications
d'Haïti (Téléco); l'Electricité d'Haïti (Ed'H), la Banque Populaire d'Haïti
(BPH), la Banque Nationale de Crédit (BNC); l'Autorité Portuaire Nationale
(APN), l'Autorité Aéroportuaire Nationale (AAN) et les agro-industries
telles que les Sucreries de Welch et de Darbonne, l'huilerie ENAOL, la
Beurrerie du Sud et la Filature des Gonaïves. Au total il y a 55
entreprises publiques qui figurent sur la liste de la privatisation. René
Préval ne retourne pas au pouvoir pour abolir mais pour accomplir une
mission secrète. Il dispose déjà de toutes les provisions légales pour
mettre à exécution son projet. En effet dans son Numéro 75-A, 151ème Année,
le Moniteur, Journal Officiel de la République d'Haïti a publié le 10
octobre 1996 la loi portant sur la Modernisation des Entreprises Publiques
votée par le Corps Législatif. Le Premier Ministre demeure le Personnage
clé du Conseil de Modernisation des Entreprises Publiques. Ainsi se
justifie le choix de Jacques Edouard Alexis par les hommes d'affaires
intéressés comme maître-d'oeuvre , sous le couvert d'une hypothétique
modernisation. Les études d'évaluation ont déjà arrêté le choix optionnel
pour les entreprises suivantes :
- La Téléco, Le Ciment d'Haïti et La Minoterie d'Haïti seront capitalisés
c'est à dire rentabilisés suivant les principes de management propres à
l'économie capitaliste et appliqués dans le secteur privé.
- L'Autorité Aéroportuaire Nationale (AAN), l'Autorité Portuaire Nationale
(APN au Club de Bourdon) et l'Electricité d'Haïti (Ed'H à Vorbe et Fils ),
sont remises à des concessionnaires liés par un contrat de gestion avec
l'Etat.
- Les Banques commerciales, Banque Populaire Haïtienne (BPH) et la Banque
Nationale de Crédit sont aussi dans le collimateur des Grands Gosiers. Sous
peu le Gouvernement va prendre la décision finale pour livrer la BNC à un
Groupe de Banquiers faucons du Secteur Privé.
Soulignons toutefois que pour la Minoterie D'Haïti et le Ciment d'Haïti les
transactions ont déjà eu lieu. Les adjudications ont été favorables aux
acteurs qui se sont défoncés pour activer in extremis, lors des élections
présidentielles bidons de février 2006, le retour de René Préval au Palais
national et la reconduction de Jacques Edouard Alexis à la Villa d'Accueil.
Prochainement ils vont financer son élection à la présidence pour les
services rendus au Secteur privé. Cet enchaînement insidieux a donné lieu
à des manipulations financières défavorables aux caisses publiques
contrairement aux objectifs du Conseil de Modernisation des Entreprises
Publiques (CMEP). Nous assistons de préférence à la naissance des
compagnies privées : Digiciel, Haitel, Voila , sous forme de nouveaux
services et de nouveaux produits visant la maximisation des gains de
l'oligarchie haïtiano-américaine avec des incidences certaines sur
l'augmentation du coût des abonnés. Les petites bourses se défoncent pour
rester branchées à cause de la valeur ajoutée. Il n'est pas prudent
d'accorder aux dirigeants politiques le droit exclusif d'arbitrer la
privatisation des biens publics, à cause des impacts économiques énormes
qui en résultent pour le reste du Corps Social. Les cadres politiques ont
des intérêts puissants à protéger et usent des prérogatives attachées à
leurs fonctions pour signer des contrats trompe-l'oeil avec leurs
commanditaires.
Jacques Maly,
Tu m’as demandé de citer une seule entreprise étatique rentable. Sache bien
que toute la logique de la privatisation repose sur le déficit d'une
entreprise publique. Tel n'est pas du tout le cas pour la TELECO fondée en
1968 par François Duvalier et modernisée par son Fils Jean Claude Duvalier.
La TELECO disposait d'un réseau de 55.000 lignes et d'une vingtaine de
centrales pour un personnel de 2800 employés. Près de 250.000 lignes
étaient en attente. Donc la TELECO avait un potentiel d'exploitation qui
faisait baver les hommes d'affaires tant haïtiens qu'étrangers. Ce ne sont
pas les cadres techniques qui y font défaut. Il suffit d'une simple
amélioration technologique permettant de répondre à la demande et finaliser
les appels internationaux financiers pour que la TELECO dégage des revenus
annuels de l'ordre de 221 millions. Devrait-on se laisser prendre dans les
filets de la théorie néo-libérale et procéder à la capitalisation de la
TELECO. Elle représente l'entreprise publique haïtienne la plus lucrative
et la principale source de devises internationales du Pays.
Pourquoi a-t-on privatisé partiellement la TELECO ?Certainement pas au
bénéfice des petites bourses. Au retour d'Aristide on a assisté au
boycottage des lignes publiques suite à l'inauguration d'une compagnie
privée de téléphone cellulaire, propriété personnelle de l'épouse du
Président des USA qui avait préalablement recommandé la privatisation des
entreprises publiques. Aujourd’hui elle prend une allure de Sonthonax pour
empêcher Haïti de glisser dans la misère tandis que toute sa fortune
estimée à 100 millions a été amassée en Haïti. A qui profite la
privatisation? C'est une logique économique favorable aux étrangers.
A cette situation dramatique s'ajoute un autre ingrédient: la médiocrité du
Parlement. Nos Sénateurs et nos Députés ne font preuve d'aucune éthique.
Autrefois dans l'imaginaire haïtien on se représentait un Parlementaire
comme un homme droit, honnête, intègre et fier de sa cocarde. Aujourd'hui
ils sont trempés dans toutes sortes d'activités peu reluisantes. Ce n'est
pas tellement le comportement du Parlementaire, pris isolément, ni les
méfaits d'un groupe d'hommes maffieux et cupides qui nous chiffonnent, mais
la décadence de l'Institution législative appelée à exercer un contrôle sur
les activités de l'Exécutif. L'Assemblée Nationale selon les voeux de la
Constitution de 1987 peut juger le Président de la République, le Premier
Ministre et ses Ministres pour malversations et crimes de haute trahison.
La vente même partielle d'une entreprise aussi lucrative que la TELECO à
des firmes privées proches du Gouvernement a un impact sur la fonction
globale de l'économie nationale. Il est périlleux de laisser une décision
aussi cruciale à la discrétion des membres de l'exécutif. Elle devrait être
entérinée par les Pères conscrits de la Nation après une analyse
scrupuleuse du dossier. Mais qui est au Parlement Haïtien pour inspirer une
telle marge de confiance sans les connaissances aussi pointues pour
éplucher un tel dossier afin de l'accepter ou le rejeter, le cas échéant.
Nos Parlementaires ne jouissent d'aucune indépendance de pensée et ne font
pas montre d'un zeste de nationalisme. Au lieu de siéger dans les intérêts
de leurs mandants, ils profitent de l'asymétrie des informations afin de
tirer des dividendes dans leurs rapports avec l'Exécutif. Les compagnies de
téléphone cellulaire, satellites de la TELECO, représentent de véritables
sangsues qui ont pris naissance avec la privatisation et la
déréglementation, pronées par la doctrine néo-libérale.
Il devient aussi plus lucratif pour les Partis Politiques dits d'opposition
d'abonder dans le sens des décisions gouvernementales par leur mutisme et
leur absentéisme, exception faite du RNDP de Leslie Manigat. La conversion
du Ciment d'Haïti et de la Minoterie d'Haïti en entreprises privées n'a pas
accéléré le développement économique et social d'Haïti comme prévu par les
architectes du Programme de Modernisation des Entreprises Publiques. Au
contraire c'est la chute de notre PNB due à l'arrêt complet des moulins de
la Minoterie et à la cessation de l'exploitation de l'usine de Fond Mombin.
Au lieu de produire du ciment et de la farine on les importe. Il résulte de
ces manoeuvres purement spéculatives une baisse de la production nationale,
une augmentation du chômage et un déséquilibre profond de la balance
commerciale avec des incidences malheureuses sur les marchés de l'emploi et
de la monnaie. Pour comble de malheurs ces entreprises truquent leurs
revenus imposables et le fisc haïtien n'en tire aucune recette. Leurs
profits transférés à l'étranger ne rejaillissent pas, faute de leur
réinvestissement, sur l'économie nationale saignée à blanc. Une complicité
aussi flagrante entraîne des conséquences systémiques très étendues et
dégénératives de l'économie nationale.
La malfaisance devient une formule d'enrichissement rapide. Seuls les
imbéciles sont honnêtes. Il se développe maintenant en Haïti une relation
symbiotique entre les gardiens de la loi et les contrevenants à la loi. La
plus brillante illustration nous est donnée cette semaine par le Président
René Préval qui éprouve une légitime fierté à annoncer que" Le retour des
forces de l’ordre à Cité Soleil a été négocié avec les chefs de gangs, ce
qui a permis une pénétration sans heurt, sans confrontation en accord avec
les chefs de gang et la population et dans le dialogue. "Pour renchérir la
bandits ont vite annoncé l'Opération Bagdad II. Sous le camouflage de la
Gauche, René Préval au cours de son Premier mandat avait clairement signé
l'arrêt de mort de l'Economie Nationale par la formation du Conseil de
Modernisation des Entreprises Publiques (CMEP), un euphémisme utilisé pour
vendre les entreprises publiques à un Groupe Unique de la Banque qui a
financé sa campagne électorale. Aujourd'hui la mission secrète de René
Préval c'est de chanter les funérailles de l'économie nationale avec l'aide
empressée d'une pléiade de croque-morts travestis en banquiers.
Jacques Maly,
En économie on ne peut pas se contenter de vœux pieux. Le verbe fumeux
s’efface devant la réalité. Le taux de croissance du PIB est le seul
indicateur fiable de l’évolution économique dont la privatisation serait
porteuse, selon vous. Pour satisfaire votre faim d’informations je vous
offre ce plat complet. Il renferme toutes les preuves de notre déchéance
économique. Je soumets à ton appréciation les taux de croissance de
l’économie haïtienne de 1996, point de départ de la privatisation jusqu’à
2008. Bon appétit Jacques Mali.
1996: 2,7
1997: 2,2
1998: 2,7
1999:-12
2000: 0,39
2001: -1,04;
2002: -0,26
2003 : 0,36
2004: -3,52
2005: 1,8;
2005: 1,8;
2006: 2,3
2007: 3,4
2008: 1,3
Jacques Maly,
Où est le progrès économique engendré par la privatisation depuis 1996?
Cordialement
Jean Erich René
Jean Erich René
Ottawa le 28 avril 2009
J’apprécie la justesse de ton intervention et ton style courtois, deux
qualités rares sur nos forums. Mais je n’arrive pas à identifier les points
de désaccord mentionnés. Au contraire tu n’as apporté que plus de
précisions que je ne jugeais même pas nécessaires puisque les faits sautent
tellement aux yeux de tous. Pour mettre en évidence la corrélation entre la
privatisation et la déchéance de l’économie haïtienne consultons l’histoire
récente :
Jacques Maly,
1.- Je conviens avec toi qu’en évoquant la privatisation de la douane que
je voudrais parler du port et de l’aéroport de Port de Port-au-Prince qui à
mon avis représentent les deux plus gros morceaux des recettes douanières
d'Haïti. Combien de compatriotes ont expédié une voiture en Haïti et qui se
trouvent dans l’obligation de l’abandonner à la Douane parce qu’on réclame
des frais supérieurs au prix d’achat de ces voitures de seconde main. Je
peux encore te citer le cas d’un Groupe d’amis de la diaspora qui voulaient
porter secours aux sinistrés du cyclone Jeanne en 2004 en expédiant des
réchauds à gaz. 80.000 dollars ont été réclamés pour leur dédouanement.
Ils ont tout abandonné! Ce n’est qu’en 2007 qu’ils ont été livrés après le
ravage des cyclones aux Gonaïves. Ces deux exemples suffisent pour
illustrer les cas d’extorsion qu’exerce le Club de Bourdon au niveau du
port de Port-au-Prince. Savez pourquoi la route Cayes –Jérémie financée par
la BID depuis l’année dernière n’a jamais été exécutée? Ces mêmes
publicains ayant pris connaissance de ce projet ont récupéré le plan de
construction en déclarant que l’aire du tracé passe sur leurs propriétés
privées et réclament des dédommagements. Le coût de la route monte
automatiquement à 200 millions. La BID a laissé tomber Ce n’est que cette
semaine après le cri des Jérémiens : « Pas de route pas de vote » que le
Ministre des travaux Publics annonce que le projet commencera en juillet et
durera 30 mois. Prions le Seigneur!
2.-Le congé fiscal dont je parle ne s’inscrit pas du tout dans le cadre des
attributions de l’État pour couvrir les pertes enregistrés par suite du
déchouquage au départ d’Aristide en 2004. Les entreprises industrielles et
commerciales sont déjà couvertes par des polices d’assurance. L’allègement
fiscal est une incitation à l’investissement, mais le congé fiscal est une
gabegie administrative. Avec quoi l’État va-t-il s’acquitter de ses devoirs
: refaire les routes, ramasser les piles de fatras? C’est pas sérieux. Je
blâme Gérard Latortue à ce point de vue. Il a accordé ce congé fiscal parce
que ce sont les membres du Groupe des 184 qui l’ont choisi comme Premier
Ministre après avoir machiné la chute d’Aristide. C’était le prix payé en
retour pour son portefeuille de Premier ministre. Point barre.-
3.- Le dossier de la privatisation a été lancé depuis 1985. Mais aucun
gouvernement avant Préval ne voulait l’exécuter. Tout a commencé par un
document confidentiel de la Banque Mondiale daté du 11 avril 1996
recommandant une cure de minceur de l'État haïtien selon le régime de la
privatisation des entreprises publiques,condition sine qua non de la
reprise de l'aide internationale bloquée depuis 1995. La balle a été
encaissée à bout portant par René Préval qui, immédiatement après avoir été
reçu par Bill Clinton, a lancé les débats selon les voeux des Institutions
de Brettons Wood.
Le 2 Octobre 1996, An 193è de l'Indépendance, le Gouvernement de René
Préval, première version, a créé le Conseil de Modernisation des
Entreprises Publiques (CMEP). Dans un premier temps les entreprises visées
sont: la Minoterie d'Haïti, Le Ciment d'Haïti, les Télécommunications
d'Haïti (Téléco); l'Electricité d'Haïti (Ed'H), la Banque Populaire d'Haïti
(BPH), la Banque Nationale de Crédit (BNC); l'Autorité Portuaire Nationale
(APN), l'Autorité Aéroportuaire Nationale (AAN) et les agro-industries
telles que les Sucreries de Welch et de Darbonne, l'huilerie ENAOL, la
Beurrerie du Sud et la Filature des Gonaïves. Au total il y a 55
entreprises publiques qui figurent sur la liste de la privatisation. René
Préval ne retourne pas au pouvoir pour abolir mais pour accomplir une
mission secrète. Il dispose déjà de toutes les provisions légales pour
mettre à exécution son projet. En effet dans son Numéro 75-A, 151ème Année,
le Moniteur, Journal Officiel de la République d'Haïti a publié le 10
octobre 1996 la loi portant sur la Modernisation des Entreprises Publiques
votée par le Corps Législatif. Le Premier Ministre demeure le Personnage
clé du Conseil de Modernisation des Entreprises Publiques. Ainsi se
justifie le choix de Jacques Edouard Alexis par les hommes d'affaires
intéressés comme maître-d'oeuvre , sous le couvert d'une hypothétique
modernisation. Les études d'évaluation ont déjà arrêté le choix optionnel
pour les entreprises suivantes :
- La Téléco, Le Ciment d'Haïti et La Minoterie d'Haïti seront capitalisés
c'est à dire rentabilisés suivant les principes de management propres à
l'économie capitaliste et appliqués dans le secteur privé.
- L'Autorité Aéroportuaire Nationale (AAN), l'Autorité Portuaire Nationale
(APN au Club de Bourdon) et l'Electricité d'Haïti (Ed'H à Vorbe et Fils ),
sont remises à des concessionnaires liés par un contrat de gestion avec
l'Etat.
- Les Banques commerciales, Banque Populaire Haïtienne (BPH) et la Banque
Nationale de Crédit sont aussi dans le collimateur des Grands Gosiers. Sous
peu le Gouvernement va prendre la décision finale pour livrer la BNC à un
Groupe de Banquiers faucons du Secteur Privé.
Soulignons toutefois que pour la Minoterie D'Haïti et le Ciment d'Haïti les
transactions ont déjà eu lieu. Les adjudications ont été favorables aux
acteurs qui se sont défoncés pour activer in extremis, lors des élections
présidentielles bidons de février 2006, le retour de René Préval au Palais
national et la reconduction de Jacques Edouard Alexis à la Villa d'Accueil.
Prochainement ils vont financer son élection à la présidence pour les
services rendus au Secteur privé. Cet enchaînement insidieux a donné lieu
à des manipulations financières défavorables aux caisses publiques
contrairement aux objectifs du Conseil de Modernisation des Entreprises
Publiques (CMEP). Nous assistons de préférence à la naissance des
compagnies privées : Digiciel, Haitel, Voila , sous forme de nouveaux
services et de nouveaux produits visant la maximisation des gains de
l'oligarchie haïtiano-américaine avec des incidences certaines sur
l'augmentation du coût des abonnés. Les petites bourses se défoncent pour
rester branchées à cause de la valeur ajoutée. Il n'est pas prudent
d'accorder aux dirigeants politiques le droit exclusif d'arbitrer la
privatisation des biens publics, à cause des impacts économiques énormes
qui en résultent pour le reste du Corps Social. Les cadres politiques ont
des intérêts puissants à protéger et usent des prérogatives attachées à
leurs fonctions pour signer des contrats trompe-l'oeil avec leurs
commanditaires.
Jacques Maly,
Tu m’as demandé de citer une seule entreprise étatique rentable. Sache bien
que toute la logique de la privatisation repose sur le déficit d'une
entreprise publique. Tel n'est pas du tout le cas pour la TELECO fondée en
1968 par François Duvalier et modernisée par son Fils Jean Claude Duvalier.
La TELECO disposait d'un réseau de 55.000 lignes et d'une vingtaine de
centrales pour un personnel de 2800 employés. Près de 250.000 lignes
étaient en attente. Donc la TELECO avait un potentiel d'exploitation qui
faisait baver les hommes d'affaires tant haïtiens qu'étrangers. Ce ne sont
pas les cadres techniques qui y font défaut. Il suffit d'une simple
amélioration technologique permettant de répondre à la demande et finaliser
les appels internationaux financiers pour que la TELECO dégage des revenus
annuels de l'ordre de 221 millions. Devrait-on se laisser prendre dans les
filets de la théorie néo-libérale et procéder à la capitalisation de la
TELECO. Elle représente l'entreprise publique haïtienne la plus lucrative
et la principale source de devises internationales du Pays.
Pourquoi a-t-on privatisé partiellement la TELECO ?Certainement pas au
bénéfice des petites bourses. Au retour d'Aristide on a assisté au
boycottage des lignes publiques suite à l'inauguration d'une compagnie
privée de téléphone cellulaire, propriété personnelle de l'épouse du
Président des USA qui avait préalablement recommandé la privatisation des
entreprises publiques. Aujourd’hui elle prend une allure de Sonthonax pour
empêcher Haïti de glisser dans la misère tandis que toute sa fortune
estimée à 100 millions a été amassée en Haïti. A qui profite la
privatisation? C'est une logique économique favorable aux étrangers.
A cette situation dramatique s'ajoute un autre ingrédient: la médiocrité du
Parlement. Nos Sénateurs et nos Députés ne font preuve d'aucune éthique.
Autrefois dans l'imaginaire haïtien on se représentait un Parlementaire
comme un homme droit, honnête, intègre et fier de sa cocarde. Aujourd'hui
ils sont trempés dans toutes sortes d'activités peu reluisantes. Ce n'est
pas tellement le comportement du Parlementaire, pris isolément, ni les
méfaits d'un groupe d'hommes maffieux et cupides qui nous chiffonnent, mais
la décadence de l'Institution législative appelée à exercer un contrôle sur
les activités de l'Exécutif. L'Assemblée Nationale selon les voeux de la
Constitution de 1987 peut juger le Président de la République, le Premier
Ministre et ses Ministres pour malversations et crimes de haute trahison.
La vente même partielle d'une entreprise aussi lucrative que la TELECO à
des firmes privées proches du Gouvernement a un impact sur la fonction
globale de l'économie nationale. Il est périlleux de laisser une décision
aussi cruciale à la discrétion des membres de l'exécutif. Elle devrait être
entérinée par les Pères conscrits de la Nation après une analyse
scrupuleuse du dossier. Mais qui est au Parlement Haïtien pour inspirer une
telle marge de confiance sans les connaissances aussi pointues pour
éplucher un tel dossier afin de l'accepter ou le rejeter, le cas échéant.
Nos Parlementaires ne jouissent d'aucune indépendance de pensée et ne font
pas montre d'un zeste de nationalisme. Au lieu de siéger dans les intérêts
de leurs mandants, ils profitent de l'asymétrie des informations afin de
tirer des dividendes dans leurs rapports avec l'Exécutif. Les compagnies de
téléphone cellulaire, satellites de la TELECO, représentent de véritables
sangsues qui ont pris naissance avec la privatisation et la
déréglementation, pronées par la doctrine néo-libérale.
Il devient aussi plus lucratif pour les Partis Politiques dits d'opposition
d'abonder dans le sens des décisions gouvernementales par leur mutisme et
leur absentéisme, exception faite du RNDP de Leslie Manigat. La conversion
du Ciment d'Haïti et de la Minoterie d'Haïti en entreprises privées n'a pas
accéléré le développement économique et social d'Haïti comme prévu par les
architectes du Programme de Modernisation des Entreprises Publiques. Au
contraire c'est la chute de notre PNB due à l'arrêt complet des moulins de
la Minoterie et à la cessation de l'exploitation de l'usine de Fond Mombin.
Au lieu de produire du ciment et de la farine on les importe. Il résulte de
ces manoeuvres purement spéculatives une baisse de la production nationale,
une augmentation du chômage et un déséquilibre profond de la balance
commerciale avec des incidences malheureuses sur les marchés de l'emploi et
de la monnaie. Pour comble de malheurs ces entreprises truquent leurs
revenus imposables et le fisc haïtien n'en tire aucune recette. Leurs
profits transférés à l'étranger ne rejaillissent pas, faute de leur
réinvestissement, sur l'économie nationale saignée à blanc. Une complicité
aussi flagrante entraîne des conséquences systémiques très étendues et
dégénératives de l'économie nationale.
La malfaisance devient une formule d'enrichissement rapide. Seuls les
imbéciles sont honnêtes. Il se développe maintenant en Haïti une relation
symbiotique entre les gardiens de la loi et les contrevenants à la loi. La
plus brillante illustration nous est donnée cette semaine par le Président
René Préval qui éprouve une légitime fierté à annoncer que" Le retour des
forces de l’ordre à Cité Soleil a été négocié avec les chefs de gangs, ce
qui a permis une pénétration sans heurt, sans confrontation en accord avec
les chefs de gang et la population et dans le dialogue. "Pour renchérir la
bandits ont vite annoncé l'Opération Bagdad II. Sous le camouflage de la
Gauche, René Préval au cours de son Premier mandat avait clairement signé
l'arrêt de mort de l'Economie Nationale par la formation du Conseil de
Modernisation des Entreprises Publiques (CMEP), un euphémisme utilisé pour
vendre les entreprises publiques à un Groupe Unique de la Banque qui a
financé sa campagne électorale. Aujourd'hui la mission secrète de René
Préval c'est de chanter les funérailles de l'économie nationale avec l'aide
empressée d'une pléiade de croque-morts travestis en banquiers.
Jacques Maly,
En économie on ne peut pas se contenter de vœux pieux. Le verbe fumeux
s’efface devant la réalité. Le taux de croissance du PIB est le seul
indicateur fiable de l’évolution économique dont la privatisation serait
porteuse, selon vous. Pour satisfaire votre faim d’informations je vous
offre ce plat complet. Il renferme toutes les preuves de notre déchéance
économique. Je soumets à ton appréciation les taux de croissance de
l’économie haïtienne de 1996, point de départ de la privatisation jusqu’à
2008. Bon appétit Jacques Mali.
1996: 2,7
1997: 2,2
1998: 2,7
1999:-12
2000: 0,39
2001: -1,04;
2002: -0,26
2003 : 0,36
2004: -3,52
2005: 1,8;
2005: 1,8;
2006: 2,3
2007: 3,4
2008: 1,3
Jacques Maly,
Où est le progrès économique engendré par la privatisation depuis 1996?
Cordialement
Jean Erich René
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